suite au rp odp

L'entraînement fut suivi par un passage obligatoire de tous les participants chez l'infirmier de garde, qui était resté sur le côté pendant que chacun s'amusait, ou se faisait bolosser, par les armures face à eux. Ezekiel s'était montré plutôt chanceux, avec sa coéquipière ; chacun était parvenu à toucher les armures et à déjouer les plans que le leader, Moody, avait mis en place pour parfaire leurs techniques de duel. Une démonstration qui avait ramené le Scamander à ses années Poudlard, aux cours de Défense contre les Forces du Mal. Sans aucun doute, l'Auror aurait pu se montrer bon professeur, s'il n'était pas du genre à effrayer les gamins.

« Ta main », fit l'infirmier en tendant la sienne, quand ce fut le tour d'Ezekiel de passer sous la loupe. Celle-ci, un rien enflée, rouge aux phalanges, le lançait un peu, maintenant que l'adrénaline était passée ; mais rien qu'il ne pourrait gérer lui-même, plus tard, rentré à la Réserve. « J'me suis fait ça avant l'entraînement », répondit-il, comme si ça pouvait justifier de ne pas recevoir de soins. Ce qui ne semblait pas être l'avis de l'infirmier, qui haussa les sourcils et le regarda par-dessus ses lunettes en demi-lunes, la main toujours tendue. « Ugh. Okay », capitula-t-il en se laissant faire ; un sortilège pour remettre une phalange déplacée, un bandage pour entourer une concoction qui réduisait l'inflammation.

Il s'était mis dans cet état juste avant de rejoindre Thimius Castle. Lui avait la main abîmée et Ren, du côté de la réception, le nez un peu (plus) tordu. D'un regard alentour, Ez voulut s'enquérir de l'état de son ami, s'il s'était fait replacer le nez ou pas, mais il ne le trouva pas. Rien d'étonnant à ça ; il était dans les habitudes du Capitaine d'être là un instant, puis disparu le suivant. « Merci », grommela-t-il en se relevant, se massant la main de l'autre, pensif.

Sa manière de réagir n'avait probablement pas été la bonne. Tout comme le comportement qu'il avait eu envers son frère, Kelsier. Pourtant, Ezekiel n'arrivait pas totalement à s'en vouloir. Il avait fait confiance à ces deux hommes pendant de nombreuses années - depuis sa naissance, pour son aîné. Qu'ils aient pu lui dissimuler cette information lui semblait, encore aujourd'hui, totalement insensé. Il n'arrivait ni à se défaire du sentiment de trahison, ni du sentiment qu'il l'avait bien mérité, quelque part. Car rien de tout ça n'aurait eu lieu, s'il n'était pas parti à l'autre bout du monde sur un coup de tête.

S'éloignant un peu, Ez revint sur ses pas, en se rendant compte que presque tout le monde était parti. Il s'adressa à l'infirmier. « Tu sais où est Meda ? » De loin, il avait suivi que l'exercice s'était moins bien passé, pour son équipe, et qu'elle s'était blessée à la tête. Assez grave pour qu'elle arrête l'entraînement, et il s'inquiéta de ne pas la voir. Aurait-elle déjà repris la route ? « Elle se repose à l'étage », l'informa l'infirmer, sans relever la tête, occupé à remettre une cheville en place. Le dresseur le remercia d'un geste du menton, réfléchit une seconde, avant de prendre la décision de gravir les larges marches en pierre qui menaient au premier.

La porte n'était pas fermée, était à peine entrouverte. Si Ezekiel s'inquiétait vraiment de l'état de Meda, la femme de son meilleur ami, il avait également attendu l'occasion de lui adresser un mot, seul à seul. Ces derniers mois, l'ancienne Black avait pris grand soin de l'éviter, de ne pas croiser son chemin et il avait même la sale impression de se recevoir des regards noirs de sa part. Ce qui le déconcertait, pour le moins, puisqu'il n'avait aucune idée de l'offense qu'il avait bien pu lui faire. Et puisqu'il l'appréciait, il tenait à comprendre la cause du problème, histoire de ne pas perdre, ou teinter, une autre de ses relations qui lui tenait à cœur.

Il frappa doucement contre la porte, de sa main non blessée, avant de pousser le battant. Andromeda était assise près de la fenêtre. Il croisa son regard en entrant, mains qu'il fourra dans les poches en lui adressant un sourire poli. Il avait toujours cette mauvaise impression qu'elle s'apprêtait à lui envoyer un sortilège cuisant d'une seconde à l'autre. « J'ai entendu que tu t'étais blessée », commença-t-il en s'avançant dans la pièce, puis gardant une distance raisonnable. « Est-ce que tu vas mieux ? » Et comme il fallait toujours qu'il se rende utile, qu'il résolve des problèmes qui n'étaient pas les siens ou qu'il propose son aide, il ajouta. « Je peux t'escorter en transplannage jusqu'à Loutry, si tu veux. »

hunters seeking solid ground
@Ezekiel Scamander — novembre 1984

tw: blessure, sang, hématome
L’armure avait frappé fort. Plongée dans le brouillard, Andromeda avait pourtant tenté de se relever, et de continuer à se battre. A moitié sonnée, elle avait tâtonné à quatre pattes pour retrouver sa baguette, malgré la douleur et le sang coulant abondamment sur son visage. Elle avait entendu l’armure s’approcher à nouveau, lever son épée … Puis s’arrêter en plein geste. Le brouillard s’était dissipé pour révéler Moody à ses côtés et l’entraînement s’était arrêté là pour elle. Elle avait eu beau tempêter, il n’avait rien voulu savoir. Elle était blessée, il ne la laisserait pas prendre le moindre risque supplémentaire. Et son Mais ce n’est rien ! rageur n’avait pas tenu bien longtemps quand elle avait vacillé sur ses jambes en se relevant, manquant de s’effondrer dans les bras de Moody.
Ce n’était pas rien.
Et c’était terminé.

A présent elle se reposait dans une pièce isolée du reste du groupe.
Quelle humiliation. Elle avait tenu quoi, cinq minutes à l’entraînement ? Juste le temps de lancer un sort, de se réjouir de sa réussite, puis de se faire aplatir lamentablement. A ce qu’elle en savait, elle avait fait le score le plus minable de tout leur petit groupe. Et pour une compétitrice enragée comme elle, la pilule était difficile à avaler. Elle savait que ses talents de duelliste s’étaient émoussés avec les années – faute de pouvoir s’entraîner avec Bellatrix comme elles le faisaient à la moindre occasion, à Poudlard – et qu’elle n’avait pas la même dextérité de la main gauche que de la main droite. Mais il ne s’agissait même pas de ça. Ses réflexes s’étaient également amoindris. Deux ans plus tôt, elle aurait esquivé l’attaque de l’armure sans aucun problème, elle en restait persuadée. Et le constat était difficile à accepter.

Plongée dans ses pensées, elle contemplait le parc du château, assise sur le fauteuil où l’infirmier l’avait consignée. Elle n’avait rien de grave, mais elle devait éviter de bouger pendant un moment, juste le temps de se remettre. Encore un satané signe qu’elle vieillissait : quand elle jouait au Quidditch, se prendre un Cognard ou un coup de batte ne l’avait jamais empêchée de remonter illico sur son balai. A présent elle devait rester tranquille le temps de se remettre … Elle avait l’impression d’avoir pris vingt ans en quelques heures.

Un coup frappé à la porte lui fit tourner la tête, mais son visage se ferma en reconnaissant Ezekiel dans l’embrasure. Il ne manquait plus que lui. Elle détourna le regard et se remit à regarder le parc, en espérant qu’il comprendrait le message et la laisse tranquille. Mais au fond, elle en doutait. « J'ai entendu que tu t'étais blessée » Forcément. Il était un ami – ou il l’avait été, elle ne savait plus très bien comment le considérer. Il s’inquiétait pour elle, c’était normal. Mais elle ne voulait pas de sa compassion, elle ne voulait même pas lui adresser la parole. Elle réprima un soupir agacé et haussa une épaule. « Ce n’est rien. » Son visage démentait sûrement cette affirmation. Elle s’était vue dans un miroir, elle avait une impressionnante marque violacée sur tout le côté de sa figure et son œil droit était si gonflé qu’elle y voyait à peine. Mais le cataplasme de l’infirmier faisait son œuvre, elle ne sentait déjà presque plus rien et le bleu se résorbait doucement. « Est-ce que tu vas mieux ? » Andromeda serra les lèvres. Ezekiel s’adressait à elle comme elle s’imaginait qu’il le faisait avec un dragon blessé. Avec précautions, pour ne pas réveiller la furie de la bête. Il faisait bien, elle lui gardait encore une rancune tenace pour ce qu’il avait fait. « Mais oui, ça va. » Répondit-elle d’un ton sec. « Ce n’était rien, je te dis. C’est plus impressionnant qu’il n’y paraît. » La dernière chose qu’elle voulait, c’était qu’il s’imagine qu’elle avait été sérieusement blessée et qu’il aille le raconter à Ted. « Je peux t'escorter en transplannage jusqu'à Loutry, si tu veux. » Une expression irritée traversa son visage. Elle n’était pas invalide, tout de même ! « Je n’ai pas besoin de ton aide. » Et d’ailleurs elle n’avait besoin de l’aide de personne. Elle avait assez traîné ici, en regardant tous les membres de l’Ordre sortir un par un dans le parc et transplaner pour quitter les lieux. Elle se leva d’un bond, bien décidée à rentrer chez elle malgré la marque encore trop visible sur sa tempe et l’inquiétude qu’elle causerait à Ted. « Je vais … » Les mots s’évanouirent sur ses lèvres. Un vertige l’avait prise dès qu’elle s’était mise debout, la pièce se mit à tourner autour d’elle et la migraine revint vriller son crâne. Elle tendit maladroitement la main derrière elle pour s’appuyer sur le siège, mais ses doigts ne rencontrèrent que le vide et elle bascula en arrière.  

Le château était une vieille bâtisse, la plupart du temps inhabitée et aux pierres froides, mal chauffé. Pourtant, l'ambiance glaciale qui régnait ici n'avait rien à voir avec les lieux, mais tout avec la compagnie. Lorsque Ezekiel entra dans la pièce, il capta aussitôt que sa présence incommodait Andromeda, qu'elle aurait préféré avoir affaire à n'importe qui, plutôt qu'à lui. La raison lui échappait toujours - et s'il avait pris l'habitude de ne pas relever, en attendant qu'elle lui déclare d'elle-même quel était le problème, il était aujourd'hui résolu à en savoir plus. « Ce n'est rien. » Ses lèvres disaient peut-être quelque chose, mais son visage, lui, ne pouvait mentir : elle était toute gonflée et violacée d'un côté, bien que le sorcier pouvait se rendre compte que les choses allaient en s'améliorant, qu'elles avaient été pires. Avec précaution, l'homme s'avança dans la pièce, pour s'enquérir de son état. La réponse était évidente, pourtant, Andromeda continuait de nier, et de le repousser. « Mais oui, ça va. Ce n’était rien, je te dis. C’est plus impressionnant qu’il n’y paraît. » Une nouvelle fois, le dresseur ne releva pas. Si elle le disait, hein. Ce n'était certainement pas sa place de s'inquiéter plus que de raison pour elle, surtout dans cette situation où elle ne voulait clairement pas qu'il s'en mêle. Tout ce qu'il pouvait faire, à la limite, était lui proposer de l'aide pour rentrer chez elle - une perspective qu'elle balaya d'un ton sec. « Je n’ai pas besoin de ton aide. » Sourcils froncés, le Scamander se rebiffa, épaules basses du traitement réservé à ses tentatives. « Très bien », grommela-t-il, prêt à tourner les talons. Ce n'était visiblement pas le bon moment ; il retenterait sa chance quand elle irait mieux. « Comme tu voudras. »

« Je vais ... » Comme sur ressort, la Tonks s'était relevée, puis mise dangereusement à tanguer. Dans un réflexe, pour ne pas qu'elle s'effondre en arrière, Ezekiel la rattrapa par le bras, puis mit une main entre ses omoplates. « Meda ? Ça va ? Tu m'entends ? » Elle semblait encore consciente, mais très troublée, et sa grimace laissait présager une souffrance certaine, bien qu'Ez n'avait aucune idée d'où elle pouvait provenir. La tête, sans doute. « Tu ferais mieux de t'allonger », lui conseilla-t-il, en la guidant vers l'assise qu'elle avait quittée. « Je vais appeler Philip. » L'infirmier, qui devait toujours se trouver au rez-de-chaussée. Pour ne pas la laisser seule, Ez prit sa baguette et lança un sortilège destiné à donner l'alerte, attirer l'attention de ceux qui se trouvaient en bas. « Meda ? » Les yeux clos, cette fois, la sorcière semblait avoir perdu conscience.

Il ne savait depuis combien de temps il attendait que Meda se réveille - plus d'une demi heure, mais moins d'une heure à n'en point douter. Enfoncé dans un fauteuil qui avait perdu sa première fraicheur depuis longtemps, Ez terminait les mots croisés d'un vieux Sorcière Hebdo que quelqu'un avait laissé traîner. Il se redressa en voyant du mouvement, la sorcière s'agitait enfin. « Tu as perdu connaissance », l'avisa-t-il en se redressant, mais sans quitter sa chaise, puis fermant le magazine. Son visage avait déjà meilleure allure que tout à l'heure - on lui aurait dit une tâche de vin sur la tempe, sans le côté gonflé. « Philip avait des obligations, il m'a demandé d'attendre avec toi que ça aille mieux. Il recommande d'attendre que ton hématome soit totalement résorbé avant que tu ne tentes de t'en aller. » Son ton était informatif - cette fois, il ne lui demanda pas comment elle se sentait ; si c'était pour qu'elle prétende que tout aille bien, de toute façon. Voyant qu'elle avait compris, il s'adossa de nouveau dans le siège, jouant un instant avec le stylo bille dont le bruit résonna dans la pièce, puis il reprit à faire des traits dans les cases. Pas longtemps, avant que son regard ne passe par-dessus les feuilles du magazine, vers Meda qui bougeait. « Meda », fit-il en se redressant, réprobateur, « est-ce que tu veux bien ne pas t'agiter juste parce que c'est moi ? On peut simplement attendre en silence, si tu ne veux pas me parler. Même si je ne sais pas pourquoi. »

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@Ezekiel Scamander — novembre 1984

tw: blessure, hématome, mention d'enlèvement
Elle eut conscience qu’Ezekiel la rattrapait avant qu’elle ne tombe, elle entendit sa voix sans parvenir à comprendre ce qu’il disait. La douleur se fit plus aigüe, brouillant ses autres sens, jusqu’à ce que l’obscurité l’engloutisse tout entière. Alors la douleur sous son crâne s’estompa doucement et le temps cessa de s’écouler.  

Le déplaisant battement dans sa tête réapparut en premier, puis Andromeda ouvrit les yeux, le souvenir de son malaise encore trop vague dans son esprit pour comprendre ce qui lui était arrivé. Elle regarda autour d’elle, confuse. Elle se trouvait toujours dans la chambre de l’étage, cette fois allongée sur le lit où elle avait refusé de se reposer après l’entraînement. Et près d’elle se trouvait Ezekiel, qui fronçait les sourcils sur un vieux magazine, installé dans le fauteuil comme s’il se trouvait chez lui. Si elle fut soulagée de ne pas se réveiller seule, elle ressentit également une vague d’agacement en constatant qu’il était toujours là. Elle se redressa précautionneusement, sa tête toujours serrée dans un étau. Cette fois elle ne se sentait plus d’attaque pour bondir hors de la pièce en furie, mais elle n’allait pas non plus rester couchée comme une mourante, avec Ezekiel à son chevet.

Son geste le tira de son magazine et il leva la tête vers elle. « Tu as perdu connaissance » Elle l’avait compris seule, merci bien. « Philip avait des obligations, il m'a demandé d'attendre avec toi que ça aille mieux. Il recommande d'attendre que ton hématome soit totalement résorbé avant que tu ne tentes de t'en aller. » Elle grimaça sans répondre et détourna le regard pour ne pas croiser celui d’Ezekiel, maudissant mentalement Philip qui l’avait clouée à ce lit. Il l’avait peut-être même fait exprès. L’avait-elle offensé par le passé ? Elle ne parvenait pas à s’en souvenir, mais elle décida que c’était une possibilité, qui expliquait qu’elle se sente encore si mal. Pas capable de guérir une simple commotion, tu parles ! A moins qu’il ne soit un véritable incapable. Ted l’aurait déjà remise sur pied, elle n’en doutait pas. Elle soupira, franchement agacée.  Et Ezekiel qui avait été assigné comme son garde-malade ! Quelle poisse, vraiment. Au moins ne tentait-il plus de faire la conversation, il était assez intelligent pour avoir compris le message.

Elle avait du mal à rester en place. Toute cette situation l’irritait au plus haut point, sans qu’elle ne puisse y faire grand-chose. Elle sentait bien que se lever n’était pas très raisonnable dans son état actuel, elle ne tenait pas à tomber une nouvelle fois sous le nez d’Ezekiel. Elle chercha ses affaires dans la pièce, les repéra bien trop loin du lit pour les attraper sans mal. Un nouveau soupir franchit ses lèvres qui cette fois fit relever la tête à son cerbère. « Meda, est-ce que tu veux bien ne pas t'agiter juste parce que c'est moi ? » Ce n’était pas juste lui, il ne devait pas se donner trop d’importance. C’était lui et l’armure qui l’avait frappée – et également l’incompétence de Philip, et un peu Moody aussi, et toute une autre flopée de petits désagréments du même type. Et lui en grande partie. Peut-être. « On peut simplement attendre en silence, si tu ne veux pas me parler. » « Ce sera parfait. » Marmonna-t-elle entre ses dents serrées en fixant le mur en face d’elle. « Même si je ne sais pas pourquoi. » Elle tourna vivement la tête vers lui, grimaça à la douleur qui en résulta, et émit un petit bruit de gorge méprisant. « Quoi ? Tu pensais vraiment que j’allais laisser couler ce qui s’est passé, comme tout le monde ici ? » Les têtes pensantes de l’Ordre avaient étouffé l’enlèvement de Cordelia rapidement et efficacement. Il n’y avait eu qu’un seul dommage collatéral, Hasan, qui avait vu sa tête rouler alors qu’il n’avait eu aucune responsabilité dans l’affaire. « Tu m’as déçue. » Lâcha-t-elle, amère. « Dahlström est taré, mais toi ? Tu vaux mieux que ça. Du moins je le croyais. » Ca avait rendu Andromeda malade. Et elle ne supportait pas de regarder Ezekiel ouvrir de grands yeux à présent, comme si …. Comme s’il ignorait de quoi elle parlait. L’innocence incarnée – si elle n’avait pas su dans quoi il avait trempé. « Arrête de jouer au con, Scamander ! » S’écria-t-elle, les poings serrés sur le dessus de lit miteux. Il pouvait faire semblant avec tous les autres, mais pas avec elle. Elle avait vu de ses propres yeux sa cousine attachée dans sa réserve. « Je sais ce qui s’est passé ! J’étais là, chez toi. »

Andromeda accueillit ses explications d'un regard noir - elle l'aurait pétrifié sur place avec la simple volonté si elle l'avait pu. Ce qui eut pour effet de rafraîchir la mémoire d'Ezekiel, et c'est en actionnant le stylo-bille qu'il remplit les cases de son mot-mêlé. Horizontale, 6 lettres. Créature mythologique dont le regard peut pétrifier ses victimes. Méduse. Ou Meda. Presque pareil.

Il lui était difficile de se concentrer, derrière ses lunettes qu'il n'avait pas l'habitude de porter, bien qu'il était obligé de les sortir de plus en plus souvent. C'était surtout d'entendre le couinement du vieux lit dans lequel Andromeda ne cessait de se tourner, d'un côté puis de l'autre ; puis ce soupir frustré qui lui fit définitivement perdre de l'intérêt dans ce magazine aux informations datées. Qu'elle cesse donc de s'agiter, elle se rétablira plus vite ! Et ils pourront se séparer aussitôt, chacun de leur côté. Ne leur suffisait que d'attendre dans le plus plombé des silences. « Ce sera parfait. » Il hocha la tête, satisfait. Enfin, à peine. C'était étrange, cette ambiance entre lui et la femme de son meilleur ami. Depuis qu'ils se connaissaient, ils n'avaient jamais eu de mal à se faire la conversation - et il aurait tant aimé lui parler de Nora, et de Liv. Sauf que ce n'était pas le moment, ni maintenant ni depuis quelques mois. Et il n'arrivait pas à mettre le doigt sur la raison. « Quoi ? Tu pensais vraiment que j’allais laisser couler ce qui s’est passé, comme tout le monde ici ? »

Son regard stupéfait se redressa vers Meda, l'incompréhension toujours lisible sur son visage. « De quoi tu p- » Mais elle ne lui laissa pas l'occasion de poser des questions - déballant ce qu'elle avait sur le cœur depuis bien longtemps. « Tu m’as déçue. Dahlström est taré, mais toi ? Tu vaux mieux que ça. Du moins je le croyais. » Doucement, ses lippes ouvertes tel un poisson hors de l'eau se refermèrent, et Ezekiel referma le magazine, le déposant sur l'accoudoir. « Arrête de jouer au con, Scamander ! » L'utilisation de son nom de famille par la voix énervée de Meda fut sans doute ce qui le brusqua le plus. Il secoua la tête, mais la Tonks n'avait pas fini. « Je sais ce qui s’est passé ! J’étais là, chez toi. »

« Je ne joue à rien du tout », affirma-t-il, le ton grave. « Je ne vais pas... Nier ce qu'il s'est passé, ni mon implication. » Il décroisa les jambes, s'appuya des coudes sur ses genoux, sa paire de lunettes dans une main. De l'autre, il se pinça l'arête du nez, puis releva le regard vers Andromeda. « On n'a jamais voulu que ça prenne ces proportions, Meda. Ce qu'on voulait, c'était attraper l'un d'entre eux. Récolter des informations. Tout, pour mettre fin à ce conflit. C'était pas supposé... Déraper à ce point. » Ses explications étaient minables, il en était bien conscient. Andromeda n'était pas la première à qui il avait dû rendre des comptes sur cette histoire - ni la plus exaltée. Après Moody, l'interrogatoire de son amie n'était pas aussi inconfortable. Peut-être juste un rien douloureux. « Ren a déconné. Je sais qu'il en est conscient. » Enfin, si on écoutait le pirate, la jeune femme qu'ils avaient enlevée n'avait eu que ce qu'elle méritait - mais il connaissait assez son ami pour savoir que même lui n'était pas en adéquation avec tout ce qu'il s'était passé dans cette grange. « Quant à moi... J'ai pas fait mieux. J'ai voulu attendre Moody. Et quand il est arrivé... Elle était partie. » N'avaient-ils pas eu encore l'air plus con. Leur prisonnière, dans la nature, qui n'allait pas manquer leur envoyer ses amis mangemorts sur sa réserve... Mais non, rien. Il n'y avait eu aucunes représailles du camp adverse. « J'essaye pas de me trouver des excuses. Je suis désolé pour elle, mais on a au moins essayé d'agir. Et elle connait des mangemorts, ce qui n'est pas une piste négligeable. » La piste n'avait mené à rien - mais le combat n'était pas terminé.

Ezekiel se redressa, observant l'alitée, qui serait probablement en train de pointer un doigt accusateur vers lui actuellement, si elle n'était pas allongée. « C'était toi, alors. Avec Hasan. » Il aurait du s'en douter, ils formaient un bon duo. Mais pourquoi ? Il devait savoir. « Pourquoi tu l'as laissée partir ? »

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@Ezekiel Scamander — novembre 1984

tw: mention d'enlèvement et de torture
Le souvenir était gravé dans sa mémoire, douloureusement vivace. Cordelia attachée sur ce sol en terre battue comme un animal, dans une sinistre pénombre, le sang un peu partout, ses traits tirés … Rien ne justifiait la façon dont elle avait été traitée. Andromeda voulait bien croire que la plupart de ses cousins et cousines du côté des Black soit devenu Mangemort, mais elle savait que ce n’était pas le cas de Cordelia. Et si l’Ordre s’abaissait à traiter des êtres humains innocents ainsi, Andromeda ne voulait rien avoir à faire avec ça. Et qu’Ezekiel, qui avait toujours été un très bon ami de la famille, soit impliqué là-dedans … C’était pire que tout.

« Je ne joue à rien du tout. Je ne vais pas... Nier ce qu'il s'est passé, ni mon implication. » Andromeda croisa les bras sur sa poitrine et émit un petit son de gorge méprisant. Il avait le courage de reconnaître ce qu’il avait fait – et pourtant elle était déçue qu’il le fasse. Quelque part, elle avait toujours espéré que les choses se soient fait à son insu. Que Dahlström ait pris l’initiative et se soit retranché dans la réserve sans en parler à Ezekiel. Ce n’était pas le cas, et sa déception était d’autant plus vive. « On n'a jamais voulu que ça prenne ces proportions, Meda. Ce qu'on voulait, c'était attraper l'un d'entre eux. Récolter des informations. Tout, pour mettre fin à ce conflit. C'était pas supposé... Déraper à ce point. » Andromeda pouvait entendre ce genre d’arguments. Ou du moins elle était censée pouvoir les entendre. Mais ils s’en étaient pris à la mauvaise personne. Ils avaient séquestré sa cousine et elle ne pouvait pas l’accepter, quelles que soient leurs justifications.  « Ah oui, elle n’était pas censée finir attachée dans un fond de grange comme un fléreur abandonné. » Ironisa-t-elle d’un ton mordant. « Ren a déconné. Je sais qu'il en est conscient. » La réponse ne se fit pas attendre. « Je me fous bien des états d’âme de ce taré ! » S’exclama-t-elle. C’était de lui, Ezekiel, dont elle voulait la version. C’était lui qu’elle connaissait et qu’elle appréciait. Lui qui l’avait trahie en s’en prenant à Cordelia.  « Quant à moi... J'ai pas fait mieux. J'ai voulu attendre Moody. Et quand il est arrivé... Elle était partie. » « Il était au courant, Moody ? C’est lui qui vous en avait donné l’ordre ? » Elle cherchait des coupables, toujours plus de coupables. Peut-être pour trouver une raison de quitter l’Ordre. Peut-être simplement pour savoir sur qui passer sa colère. Elle-même ne savait pas trop. « J'essaye pas de me trouver des excuses. Je suis désolé pour elle, mais on a au moins essayé d'agir. Et elle connait des mangemorts, ce qui n'est pas une piste négligeable. » A nouveau un ricanement méprisant. « Désolé pour elle ? C’est lamentable. La guerre ne justifie pas n’importe quoi, tu devrais bien le savoir. »

Les Mangemorts usaient des techniques les plus vicieuses qui soient, mais c’était justement ce qui les différenciait d’eux. Normalement. « C'était toi, alors. Avec Hasan. » Andromeda ne prit même pas la peine de répondre, et lui adressa un regard noir. « Pourquoi tu l'as laissée partir ? » Elle fut estomaquée par sa question, qui lui coupa le souffle pendant plusieurs secondes. « Je ne l’ai pas laissée partir. » Répondit-elle enfin. « Je suis venue la chercher. » Et que l’Ordre vienne donc lui chercher des noises après cet aveu ! Elle se fichait des conséquences, à ce stade. Hasan avait porté le chapeau pour elle mais si Ezekiel la dénonçait, ce ne serait pas une très grande perte. « Elle fait partie de ma famille. » La famille … Un concept compliqué pour elle, dont la majeure partie de sa famille n’était plus, justement, considérée comme telle. Mais Cordelia était de ces rares que Meda portait encore dans son cœur. « Elle compte pour moi. Elle n’est pas Mangemort. » Enuméra-t-elle. « Elle était enceinte. Tu le savais ? Vous avez torturé une femme enceinte. » Le dégoût sourdait de sa voix. « Je n’allais pas la laisser pourrir au fond de ta grange comme ça. Je ne pouvais pas. »

Devant le regard lourd de reproches d'Andromeda, Ezekiel continuait à ne pas comprendre. Qu'elle n'accepte pas leurs manières de faire, qu'elle remettre en cause comment la mission s'était déroulée ou ce qui en avait découlé, il pouvait encore l'admettre. Mais toute cette histoire semblait profondément chambouler la sorcière, et le dresseur n'arrivait pas à comprendre exactement pourquoi. Cependant, il devait s'avouer soulagé de savoir enfin ce qui tracassait Meda, depuis tout ce temps, ce qui expliqua sans doute sa patience et sa bonne volonté à répondre à toutes ses interrogations - ou devrait-il dire, accusations.

« Ah oui, elle n’était pas censée finir attachée dans un fond de grange comme un fléreur abandonné. » L'homme secoua la tête, l'expression véritablement peinée. « Non, effectivement. Je suis désolé qu'on en soit arrivé là - la situation m'a échappé. » Ou, plutôt, avait-elle échappé au suédois. « Je me fous bien des états d’âme de ce taré ! » Sur le coup, Ezekiel garda les lèvres closes. Il n'y avait rien qu'il ait pu dire qui puisse laver l'honneur ou la réputation de son ami aux yeux de Meda. En vérité, il n'avait pas non plus envie d'essayer de lui trouver des excuses. Il avait, lui-même, assez sermonné le pirate pour faire semblant que cette histoire ne représentait rien. Avant de se faire sermonner à son tour par un Moody hors de lui. « Il était au courant, Moody ? C’est lui qui vous en avait donné l’ordre ? » De nouveau, il secoua la tête pour écarter cette hypothèse, bien faire comprendre à Meda qu'il n'avait rien à voir là-dedans. « Non. C'était juste nous. » En vérité, c'était surtout l'idée d'Arthur et de Ren - Ezekiel n'avait fait que prêter sa grange pour l'interrogatoire qui devait y avoir lieu. Cela lui semblait pourtant inutile de préciser tous les détails à Andromeda. Déjà, parce que cela n'aurait rien changé aux faits, à son implication, de près ou de loin. Ensuite, car cela avait eu lieu chez lui, et qu'il prenait le blâme pour tout ce qu'il s'y était passé, même s'il n'avait rien fait. Le fait qu'il n'avait rien fait était déjà une erreur en lui-même. Il ne pouvait rien dire de plus, qu'il était désolé. « Désolé pour elle ? C’est lamentable. La guerre ne justifie pas n’importe quoi, tu devrais bien le savoir. »

Cette fois, le visage du sorcier se ferma, il prit un rien de distance dans le regard en observant Andromeda. « La guerre m'a enlevé ma nièce. » Il marqua une pause, pour ne pas prononcer des paroles qu'il aurait pu regretter. « Je ne dis pas qu'on a eu raison d'agir comme ça. Mais cette femme est encore vivante et bien portante, il me semble. Nous, on n'avait pas l'intention de la tuer. » Ni même de lui faire du mal, initialement. Il ne pouvait pas dire ça, toutefois, pas assumer éternellement les erreurs d'un autre. Ce qui l'interrogeait, encore, était de comprendre l'implication de la Tonks dans toute cette affaire. Pourquoi l'avait-elle laissée partir ? N'était-ce qu'une question de devoir ? « Je ne l’ai pas laissée partir. Je suis venue la chercher. Elle fait partie de ma famille. » Surpris, il garda le silence un instant, avant de se renfoncer dans son siège. « Je l'ignorais. » Il n'avait connu Andromeda qu'en Tonks, qu'en cette sorcière aimante et ouverte au monde. Il avait tendance à oublier de quelle famille elle venait - et n'aurait jamais fait le lien entre elle et les Rosier. « Elle compte pour moi. Elle n’est pas Mangemort. » Ezekiel porta son poing à sa joue, s'y appuya en continuant d'observer la sorcière. Elle ne voulait pas lâcher l'affaire, mais lui non plus. « Pas elle, non. Mais sa sœur, probablement. C'était Brianna, qu'ils voulaient ramener, à la base. » Allez, encore une raison pour qualifier ses acolytes de gogoles. Ils n'avaient pu faire la différence entre les deux. Mais Meda n'en avait pas fini concernant sa cousine. « Elle était enceinte. Tu le savais ? Vous avez torturé une femme enceinte. Je n’allais pas la laisser pourrir au fond de ta grange comme ça. Je ne pouvais pas. » Son bras retomba mollement, alors qu'il se redressait face à l'accusation. « Non, je ne le savais pas. Personne le savait - on voulait soutirer des informations à la Mangemort », insista-t-il, parce que même si celle qu'ils avaient ramenée était innocente, ce n'était pas le cas du reste de sa famille. « Ren a cessé de l'interroger dès qu'il l'a su. » Cela ne pardonnait pas ce qu'il s'était passé, mais c'était à ce moment-là trop tard pour y changer quoi que ce soit. « J'avais pas l'intention de la laisser pourrir là-bas non plus », reprit-il, âpre. « Je n'ai pas la prétention de tenir une auberge de luxe, mais j'ai veillé à ce qu'elle ne manque de rien pendant qu'elle était là. Ce n'était pas beaucoup, ce n'était pas idéal », énuméra-t-il, la colère le gagnant peu à peu. « Mais on avait au moins quelqu'un sous la main. Quelqu'un qui avait des informations, j'en suis certain. Quelqu'un qui aurait pu nous être utile. » Rien n'était idéal dans la guerre, non. Ils avaient commis des erreurs, mais à ses yeux, celles-ci étaient justifiables, si elles avaient au moins pu les aider à récolter quelque chose. « Et toi. » Elle et Hasan, mais lui avait déjà subi les conséquences de ses actes. « Tu es venue la chercher. Tu aurais pu venir frapper à ma porte à la place, me poser tes questions à ce moment-là. Mais non. Tu as préféré nous voir, nous, comme les méchants, et la laisser partir. » Dans un grincement, il repoussa le siège, se redressa. Cette discussion le mettait mal à l'aise, puisqu'elle le mettait au pied du mur d'actions qu'il n'approuvait pas, sans pour autant les condamner. « On aurait pu tirer quelque chose de toute cette situation. Mais non. À la place, tout ça n'a servi à rien. »