meet me in the afterglow
@Edward Tonks — décembre 1983


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Noël approchait et le village de Loutry Ste Chaspoule se préparait tranquillement aux réjouissances en se parant de ses plus belles décorations. Dans la maison des Tonks, ce dimanche matin, Nymphadora s’était réveillée en poussant des cris d’excitation : il avait neigé pendant la nuit. Le spectacle était d’autant plus féérique à présent qu’une couche de poudreuse scintillante recouvrait l’herbe rabougrie et les arbres dénudés. « Bon, on peut décorer le sapin maintenant ? » Dora trépignait d’impatience en fixant le bel épicéa qui trônait dans le jardin. Elle parlait d’installer les décorations de Noël depuis Halloween, au moins. Ses cheveux passaient sans relâche du vert forêt au rouge éclatant, pour signifier à tout un chacun que sa période préférée de l’année était arrivée. « Ton père n’est pas encore rentré … On devrait l’attendre. » Immense soupir de la jeune fille. « Mais il s’en fiche de tout ça … Allez, maman ! »

En effet. Ted se fichait de décorer le sapin, de coller les stickers aux fenêtres, de mettre les guirlandes autour des buissons dans le jardin ou de cuire des bonhommes en pain d’épice. Mais il avait dit qu’il serait là, et plus important encore, Andromeda voulait qu’il soit là. Simplement qu’il soit là, même s’il ne participait pas réellement à l’élan festif. Elle voulait le voir se tenir dans le coin de la pièce pendant qu’elles prenaient toutes deux les choses en main. Parce qu’ils avaient toujours été tous les trois pour préparer les fêtes de Noël et qu’elle ne voulait pas déroger à cette tradition. Et cette année plus que jamais, elle avait besoin de retrouver ce sentiment rassurant, celui d’une famille unie, d’un cocon que rien ne pouvait atteindre. L’année avait été rude et elle avait besoin de ça.

Mais Ted n’était pas là. Malgré sa promesse de se libérer pour le week-end, il travaillait encore. Le samedi était passé, sans lui. Le dimanche défilait déjà trop vite et il ne faisait pas mine de rentrer. « D’accord, va chercher les cartons au grenier, je rentre le sapin. » Nymphadora poussa un cri de joie et s’empressa de filer au grenier pour y chercher toutes les décorations. Andromeda regarda par la fenêtre la neige qui s’était remise à tomber, le cœur serré. Ce qu’elle aurait donné pour voir Ted apparaître au fond du jardin à cet instant … Mais le manteau blanc resta immaculé et elle détourna les yeux.

Tant pis pour lui.
Tant pis pour elle.

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Au fond de son lit, Andromeda entendit la porte claquer. Elle ne regarda pas l’heure, ne bougea pas d’un pouce. Les yeux fixés au même paragraphe qu’elle ne parvenait pas à lire depuis qu’elle s’était couchée, elle entendit Dora sortir de sa chambre, dévaler l’escalier et parler à son père. Elle lui montrait sûrement le sapin décoré par ses soins, ainsi que les petits objets bricolés pour l’occasion, les biscuits de Noël tout frais de l’après-midi, et tout ce qu’elles avaient préparé ensemble. Sans lui. Meda grinça des dents et s’enfonça davantage dans le lit, les mains crispées sur son livre. Ca avait été une très belle journée mère-fille. Pourtant elle avait l’impression que tout était teinté de gris par l’absence de Ted. Comme tant d’autres fois ces derniers mois, elle l’avait passée en mère célibataire, à regretter l’absence d’un mari qui n’était plus jamais là. Elle en oubliait même les fois où il était réellement présent. Ces jours-là, trop rares, se noyaient dans l’amertume du ressentiment.

Finalement, après de longues minutes qui lui parurent des heures, des pas remontèrent l’escalier. Alors Andromeda reposa son livre, éteignit la lumière, se coucha sur le côté et ferma les yeux. Quand la porte s’ouvrit, elle feignit de dormir.

C’était trop tard.
Il lui avait trop manqué pour qu’elle lui ouvre les bras à présent.

— “Vas-t’en, Ted.”
— “Mais—”
— “Pas de mais, tout est sous contrôle. Va rejoindre ta famille.”

Et lorsqu’il transplane enfin, lorsqu’il se retrouve à l’orée du jardin de leur petit cottage, bien qu’exténué, Ted mesure les conséquences de son absence. Les reflets qui clignotaient, rouge, vert, rouge, vert, les lumières de Noël placées méticuleusement sur l’épicéa qui coloraient à leur tour le tapis blanc devant lui. Il avait manqué la fin de semaine, il avait manqué cette tradition qu’ils avaient depuis la naissance de Dora. Il avait tout manqué et pourtant, le pincement au coeur ne fut pas aussi violent qu’il aurait dû l’être.

Meda et ses secrets, le couple Tonks et les non-dits.
Puis Ted se rappelle, qu’il ne le faisait pas juste pour sa femme non,
Cette tradition, elle était pour leur fille.

Enfin, le myocarde se contracte dans un regret qui lui devient de plus en plus familier. Dans ce refus qu’il avait de brusquer Andromeda, de l’obliger à se confier à lui sur un secret qu’il ne devrait même pas savoir. La culpabilité s’engraine en lui comme un fléau, le médicomage prend une grande respiration fraiche, quelques flocons lui tombent sur la tête et enfin, il rentre à la maison. La chaleur de la demeure contraste avec le rouge de ses joues, bien qu’il n’ait passé que quelques instants dans le froid hivernal, les pas qu’il entend, il le sait, ne sont pas ceux de sa femme, mais bien ceux de son enfant et Ted plonge dans l’étreinte lorsque Nymphadora se rend à lui. Le nez dans les cheveux de l’enfant, pour se gorger d’un parfum qui lui a manqué terriblement - c’est que celui de Meda était aussi imprégné sur Dora. Un babillage efréné sur les activités de la journée, Ted qui écoute distraitement, l’ombre d’un sourire moqueur au lèvres, sourire qui s’efface peu à peu, bien contre sa volonté. Pensée fugace qui le torture, alors qu’il se demande ce à quoi aurait pu ressembler ce Noël si.. Si Bellatrix n’avait pas fait, ce qu’elle avait osé faire.

S’il laisse Nymphadora babiller, alors que son excitation se remarque aux teintes toujours alternées de sa chevelure, le père de famille la poussait gentiment vers son lit malgré tout. Il était tard, trop tard pour que cette dernière soit encore réveillée et il se doutait lors qu’elle l’avait attendu avant de rejoindre les bras de Morphée. Ted promet de lire une histoire le soir prochain, puis dépose un baiser sur le front de sa fille. Les lumières sont fermées avec l’interrupteur - c’est que Ted, malgré tout ce qu’il y avait de sorcier en lui, préférait faire les choses à la manière moldue. Une fois la porte refermée, le grand brun s’y appuit, soudainement exténué. Il traine les pas vers la salle de bain afin d’y prendre une douche, laver la vieille odeur de sainte-mangouste de ses cheveux, délier les muscles endoloris par des quarts de travail rigoureux et peut-être aussi, éviter encore quelques instants la chambre qu’il partageait avec Andromeda.

Lorsqu’il ouvre la porte, enfin, la pièce est sombre et sa femme, endormie. — “Meda.” Ted se risque à se pencher légèrement du côté du lit de sa femme. Il y a le visage fermé d’Andromeda, il y a les longs cils et quelques mèches de cheveux qui s’en parent et l’hésitation de Ted, qui s’empêche de déposer un baiser contre sa joue. Elle est endormie, il est exténué et s’il remarque que la respiration de son épouse n’est pas aussi profonde qu’elle devrait l’être, il n’en fait rien, n’en touche pas mot. Ted s’installe, se cale un peu plus dans son oreiller, mais la fatigue ne le rejoint pas. Le silence est lourd, ses iris s’habituent à l’obscurité et s’il n’arrive pas à fermer les yeux, il offre toutefois une confidence à sa douce moitié, qu’elle l’entende ou non. — “Je n’ai pas vu le temps passer.” Pas d’excuse, pour ce qu’une partie de lui avait consciemment ignoré le concept de temporalité et que si le visage de Nymphadora lui avait manqué, les silences étirés et les non-dits avec son épouse, pas autant.

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@Edward Tonks — décembre 1983

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Le pépiement de Dora, les notes plus graves de Ted y répondant ; leurs pas jusqu’à la chambre de la petite, le marchandage obligatoire avant de dormir ; les voix se taisant puis l’eau coulant dans la douche ; le silence à nouveau. Autant de sons qu’Andromeda avait suivis en se projetant dans chacune des scènes, les images bien vivaces dans sa tête – mais sans bouger de son lit. Il aurait suffit d’un simple effort de volonté pour repousser les draps, se relever et les rejoindre. Improviser une fin de soirée avec des tasses de chocolat chaud et une histoire au coin du feu. La suite prenait vie si facilement ; Dora couchée, elle se serait installée avec Ted dans le canapé, profitant de l’obscurité pour se lover contre lui, pour masser ses épaules crispées par les longues heures de travail. Et ensuite, ensuite …

Ensuite rien.
Puisqu’elle n’avait pas bougé de son lit, qu’elle avait éteint la lumière et qu’elle ne lui avait pas adressé un mot quand il était entré dans la chambre. Elle avait préféré feindre le sommeil, elle avait ignoré les images si tentantes qui faisaient naître une envie douloureuse au creux de son estomac. Mais ce n’étaient que des fantasmes. La réalité ne se pliait pas à ses chimères idylliques. La rancœur couvait au fond de ses entrailles et s’exprimait bien plus ardemment que ses envies de tendresse.  

« Je n’ai pas vu le temps passer. » Elle ferma les yeux plus fort mais ne répondit rien. Il n’y avait rien à répondre, puisqu’elle dormait. Elle ne pouvait pas lui expliquer tout ce qu’elles avaient fait sans lui, les rires qu’il avait manqué, tous ces moments qu’il perdait à multiplier les heures au travail. Elle ne pouvait lui exprimer à quel point elle se sentait abandonnée, même quand il se trouvait si près d’elle. Elle ne mettrait aucun mot sur sa frustration à dormir si loin de lui, à se réveiller sans lui, à ne le croiser que par inadvertance. Et elle ne pouvait pas non plus lui faire de reproche, laisser s’exprimer toute la rancœur qu’elle avait à le voir s’éloigner d’elle. La peur également, que leur mariage s’effrite et s’effondre sans qu’elle ne puisse rien y faire. Trop de choses qu’elle voudrait lui hurler mais qu’elle taisait depuis des semaines. Des mois. Depuis si longtemps qu’elle ne savait plus comment lui parler simplement, et que seule la colère surnageait par-dessus ce magma de sentiments étouffés. Elle dormait et elle n’avait rien à lui dire. Demain ça irait mieux, demain elle serait calmée. Demain elle réussirait à lui parler. S’il était là.

« Tu ne vois jamais le temps passer. » Elle grimaça et se maudit instantanément. Sa langue avait fourché, sa langue l’avait trahie. Andromeda soupira, agacée contre elle-même, agacée contre Ted, contre le monde entier. Mais puisque visiblement elle ne dormait pas … Le dos toujours tourné à son mari mais les yeux grands ouverts dans le noir, elle poursuivit sur sa lancée. « Tu avais remarqué qu’on est en décembre, au moins ? » Son rythme cardiaque était monté d’un cran mais sa voix restait un murmure. Dora dormait à quelques mètres d’eux, il ne s’agissait pas de la réveiller. « Si tu ne comptes pas être là non plus pour Noël, j’apprécierais que tu m’avertisses en avance. Pour une fois. »

Je n’ai pas vu le temps passer. Un mensonge, s’il se forçait vraiment à confronter la vérité. Il avait vu le temps passer, s’était rappelé -parfois trop tard- qu’il avait oublié ses obligations les plus importantes au besoins d’une cause qui ne ferait qu’une bouchée de lui. Être père, était plus important que les patients qu’il recevait à tous les jours, et pendant plus de dix ans, être avec sa femme avait été la priorité. Ce n’était qu’en agissant comme un gamin de cinq ans qu’il avait trouvé le moyen de ne pas exploser, qu’il avait trouvé le moyen d’être patient et d’attendre que Andromeda se confie à lui - plus le temps s’espaçait, plus la distance s’était fait grande. À un tel point que Ted ignorait comment il pourrait enfin retrouver celle qu’il aimait - même à ce jour - plus que sa propre vie.

Il l’aimait assez pour qu’elle garde ses petits secrets,
Il l’aimait assez pour ne pas la confronter avant qu’elle ne soit prête,
Il était trop têtu et trop occupé pour en faire autrement.
Ou pour comprendre qu’il faisait le parfait crétin d’une manière à l’autre.

— “Tu ne vois jamais le temps passer.” La silhouette de sa femme n’avait pas bougé, mais Ted pouvait tout de même entendre la déception dans sa voix. Rester muet restait la meilleure option, mais il ne pouvait pas la laisser dans l’illusion qu’il préférait l’hôpital à la présence de sa fille.  — “Meda…” une protestation qui n’a pas plus d’effet sur Andromeda, qui ne se retourne pas plus vers lui. L’ombre d’un sourire qui se glisse sur les lippes d’un mari qui constate le même entêtement que celui dont il savait faire preuve. Ils auraient du fil à retordre avec Dora si elle était un tant soit peu comme ses parents. — “Tu avais remarqué qu’on est en décembre, au moins ?” Ted retombe sur le dos, les iris qui semblent vouloir percer le plafond dans une exaspération marquée. Il est dangereux de répondre à Meda lorsqu’elle se retrouvait ainsi, mais il n’était pas de ceux qui refusaient un défi. — “Ah, est-ce donc pour cela qu’il y a de la neige sur le sol?”

Peut-être un sarcasme de trop,
Une satisfaction qui se dessinait dans le ton qu’il utilisait.
Attaquer pour ne pas se retrouver en position vulnérable,
même avec son épouse.

Elle n’abandonne toutefois pas le combat, assénant un coup qui pourtant, Ted aurait dû voir venir. — “Si tu ne comptes pas être là non plus pour Noël, j’apprécierais que tu m’avertisses en avance. Pour une fois.” Le fait que leurs voix n’étaient que des murmures rendaient presque l’échange plus grave dans ce qu’ils ne pouvaient pas se crier par soucis de réveiller leur fille. Bientôt ils n’auront plus à le faire pour ce que la petite se retrouvera à Poudlard et ils pourraient donc crier comme bon leur semblait. Incertain, toutefois qu’il s’agissait là de quelque chose qu’il désirait, Ted se passe une main dans les mèches trempées de ses cheveux avant de laisser retomber son bras contre le lit, lourdement. Il avait manqué une journée. Elle lui avait caché toute une vie, il ne pouvait pas rendre les armes, lui non plus - mais pourtant, il était épuisé. — “Je serai là, maintenant si ça ne te dérange pas..” j’aimerais dormir. Si le ton n’appelait pas à la discussion et qu’à son tour, il tournait le dos à sa femme, il savait complètement qu’il était entrain de faire l’idiot. L’idiot pour crever la distance qui se retrouvait entre lui et Andromeda, alors qu’ils n’étaient qu’à quelques centimètres de l’autre.

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@Edward Tonks — décembre 1983

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Elle n’aurait pas dû ouvrir la bouche. Elle n’aurait pas dû cesser de feindre le sommeil. A présent qu’elle était bien réveillée et qu’elle ne pouvait plus prétendre le contraire, elle brûlait de tirer sur le fil jusqu’à ce qu’une dispute éclate, elle voulait lui faire payer son absence du week-end. Ce n’était pas le moment pour ça, il était épuisé et une part d’elle-même le savait parfaitement. Ce n’était pas comme s’il avait passé la journée avec des copains à boire au pub, non, il s’était démené pour sauver des vies. Il se donnait corps et âme pour son métier – n’était-ce pas admirable ? Bien sûr, et elle avait toujours aimé ça chez lui. Il se dévouait pour les autres, il aimait ce qu’il faisait et il le faisait sans compter. Mais  où se plaçait sa famille dans tout ça ? Pourquoi est-ce qu’il laissait le boulot prendre tant de place dans sa vie depuis quelques mois, alors qu’il avait toujours réussi à faire la part des choses ? Il avait été un père dévoué avec Dora pendant dix ans, il était là, toujours là, et rien n’avait changé sauf son implication. Rien … En tout cas rien qu’Andromeda ne veuille voir, rien qu’elle ne veuille reconnaître. Elle-même ne lui parlait plus vraiment depuis son accident, mais ça ne rentrait pas en ligne de compte. Persuadée, dans sa plus grande mauvaise foi, qu’elle arriverait très bien à se confier s’il était le premier à faire un effort. S’il restait là suffisamment longtemps pour qu’elle trouve le courage de formuler à haute voix ce qui se tapissait tout au fond …

Mais non.
Il n’était pas là, et elle avait cette parfaite excuse pour lui en vouloir. C’était tellement plus facile ainsi. « Ah, est-ce donc pour cela qu’il y a de la neige sur le sol ? » Dans d’autres circonstances, elle aurait souri, voire peut-être même ri de sa répartie. « Ha-ha. » Grinça-t-elle, sans la moindre envie ni de rire, ni de sourire. Dans le noir, elle fixait le mur en face d’elle, l’estomac noué. Elle n’avait pas la moindre envie de passer Noël sans lui, comme elle n’avait pas eu envie de faire le sapin sans lui. Elle voulait désespérément que les fêtes fassent revenir les choses à ce qu’elles étaient avant – et pourtant, la présence ou non de Ted n’aurait pas ce pouvoir, elle le savait. Mais s’ils pouvaient faire semblant un moment … Cela permettrait-il de combler un peu le trou qui lui grignotait la poitrine ? « Je serai là, maintenant si ça ne te dérange pas.. » Elle sentait son agacement, son désir de mettre un terme à la conversation. Mais elle sentait aussi qu’il n’avait fait cette concession que pour la faire taire, sans y songer réellement. Elle se retourna vers lui. « Tu seras là, vraiment ? » Dans l’obscurité, elle ne voyait que son dos, même pas son visage, mais elle imaginait très bien son expression lasse. Elle ne voulait pas d’une promesse en l’air, et elle n’allait pas le laisser dormir sans avoir eu une vraie réponse. Ou une vraie dispute. « Quand est-ce que tu seras là ? Juste pour le repas ? Juste pour l’ouverture des cadeaux ? » Elle voulait pouvoir prévoir une vraie journée de fête avec Dora, pas juste un repas vite expédié parce qu’il aurait la tête à son travail. « Ce serait si difficile, de laisser tomber ton boulot pour quelques jours, pour donner à ta fille un peu plus de ton temps ? » Elle n’admettrait pas qu’elle aussi avait besoin de son temps. Dora était heureuse dès qu’elle voyait son père, même si ce n’était plus autant qu’avant. Andromeda, elle, ne savait plus ce qu’elle souhaitait réellement. « Je veux juste qu’on passe de vrais moment en famille, Ted. » Une excuse parmi tant d’autres.

— “Tu seras là, vraiment ?” et à nouveau, dos à dos avec sa femme, Ted ouvre les yeux. Les iris commençant à s’habituer au manque de luminosité, il pouvait désormais distinguer les meubles qui l’entourait. Les craques dans le plancher, l’ombre de la lune qui offrait un faisceau de lumière trop faible pour éclairer quoi que ce soit. S’il ignore la remarque de sa femme, c’est pour ne pas tomber dans un argument qui ne se terminerait pas ce soir. Il avait dit qu’il serait là. Sauf que la confirmation n’avait pas eu don d’apaiser l’épouse froissée. Au contraire, Meda semblait plus animée que jamais, pour un bout de femme qui dormait il y a quelques instants. — “Quand est-ce que tu seras là ? Juste pour le repas ? Juste pour l’ouverture des cadeaux ?” Au moins il lui offrait l’opportunité d’évacuer la frustration de ne pas l’avoir croisé réellement depuis quelques jours. — “L’un ou l’autre, ça dépend du sommeil que j’aurai ce soir, Andromeda.” et Ted s’en mord automatiquement les lippes. I didn’t mean that. Il ne rectifie toutefois pas le tir.  Elle savait que les heures allongées à Sainte-Mangouste le rendait exécrable. Elle savait qu’il ne serait pas dans la meilleure des humeurs en rentrant si tard du boulot puisque contrairement à ce que Andromeda semblait penser, il aimait passer du temps avec sa famille. Il ne pouvait se contenter des éclairs de présence qu’il offrait ces derniers mois, la solitude lui pesait et même s’il ne l’avouait pas, la présence de son épouse lui manquait plus que tout. Pas que physiquement; car ces derniers temps, même lorsqu’ils étaient dans la même pièce, ils étaient de purs étrangers - how did we do that, Meda? — “Ce serait si difficile, de laisser tomber ton boulot pour quelques jours, pour donner à ta fille un peu plus de ton temps ?” comme piqué au vif et d’une remarque qui allait forcément le faire réagir, Ted se redresse contre le matelas, offrant un ton sec à celle qui n’avait été que rarement du côté réceptif de sa mauvaise humeur. — “Dora va bien.” Dora ne remarque pas son absence, Dora sait que son père fait ce qu’il fait pour qu’elle ait un plus brillant avenir, Dora sait qu’il n’est pas un homme sans coeur; n’est ce pas? Des doutes qu’il gardait pour lui ces dernières semaines, mais qui tarissaient à la minute que sa fille lui sautait dans les bras et qu’il pouvait enfin respirer le doux parfum de ses cheveux.

Le médicomage ne faisait que répondre en sarcasmes et peu de mots. Il était conscient du mal qu’ils leurs infligeaient tout en étant bien incapable de se raisonner. Il n’était pas le seul coupable de l’état de leur couple et refusait d’en porter le blâme complètement sur ses épaules. Si Andromeda était aussi têtue que lui, il ne lui ferait pas l’honneur d’une victoire aussi facile. — “Je veux juste qu’on passe de vrais moment en famille, Ted.” et juste comme cela, elle arrive à le désarmer. Ted penche la tête vers sa femme qui elle, ne s’était toujours pas redressée dans le noir de leur chambre. Cette dernière avait vu plus d’ébats que de querelles, dans une danse qu’ils connaissaient par coeur à travers les petits arguments qu’ils avaient eu au fil des années. S’il était tenté de rendre les armes, de la prendre dans ses bras et de lui promettre le monde, il y a le reste qui lui revient en plein visage. Comme toujours. — “T’aurais dû y penser avant de commencer à garder des secrets, Meda.” C’était plus que ce qu’il avait voulu lui offrir. C’était trop et pourtant, ce n’était qu’un signe que son palpitant débordait sur sa raison. L’esprit qui refusait de lui offrir la raison de son éloignement, et le coeur qui ne pouvait supporter s’éloigner plus longtemps de son étoile. Étant toutefois un homme rationnel, le cerveau reprit le dessus sur le reste, alors que Ted bondit sur ses pieds, peu intéressé à continuer la querelle en chuchottement, à quelques pas de leurs filles, qui s’apprêtait à s’endormir. — “Je vais dormir dans le salon.” Pour éviter de dire ce qu’il y a de trop, pour éviter de te blesser plus, pour éviter de nous détruire, Meda.

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@Edward Tonks — décembre 1983

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« L’un ou l’autre, ça dépend du sommeil que j’aurai ce soir, Andromeda. » L’attaque était basse, et accentuée par l’usage de son prénom entier. Pas le meilleur moyen pour qu’elle lâche le morceau et le lui accorde, ce fichu sommeil qu’il réclamait depuis le début de leur petite conversation. La menace flottait, et Andromeda ne savait pas réellement s’il n’avait dit ça que pour l’agacer ou s’il en était capable. De non-dits en reproches pas toujours mérités, leur couple battait de l’aile. Si elle s’approchait trop près de ce précipice qui s’ouvrait devant eux, elle pouvait les faire sombrer tous ensemble. Ted, elle, et Dora. Le sol était instable mais elle poursuivait dans son entêtement. Elle n’avait pas l’intention d’y mêler leur fille, mais l’argument était trop facile pour se priver de l’utiliser. Ted ne semblait pas avoir envie de passer du temps avec sa femme, mais il ne pouvait rester insensible face à sa fille. « Dora va bien. » Percevait-elle une hésitation dans sa voix, ou bien était-ce son imagination ? « Comment pourrais-tu le savoir ? » Elle regretta immédiatement sa phrase, née de l’agacement et prononcée sans réfléchir, uniquement pour le blesser. En vérité, Ted avait raison. Dora allait bien. La petite était d’une résilience à toute épreuve et savait profiter de son père quand il était là, sans jamais se plaindre. « Elle va bien pour l’instant. » Lâcha-t-elle pour se rattraper, mais sans se priver d’un sous-entendu acerbe.

Dans le noir, elle le fixait en espérant une réaction qui ne venait pas. Le mur érigé entre eux était trop épais pour les laisser se rejoindre, alors même qu’il lui aurait suffit de tendre la main pour le toucher. Elle se languissait du contact de sa peau sur la sienne, mais quelque chose en elle redoutait de replonger dans l’ivresse si familière de leurs étreintes. Une crispation instinctive après un traumatisme noyé dans le silence. Un secret enfoui dans les tréfonds de ses entrailles vides. « T’aurais dû y penser avant de commencer à garder des secrets, Meda. » Elle se redressa immédiatement, prise de court. « Quoi ? » La dispute venait de prendre un tout nouveau tournant et le cœur d’Andromeda s’emballa en comprenant que Ted savait quelque chose. Quelque chose qu’elle lui avait caché. « Je vais dormir dans le salon. » Déjà il s’était levé, mettant sa menace à exécution. « Non ! » Jamais ils n’avaient fait chambre à part. Jamais. Et cela, bien davantage encore que la mention de ses secrets, la convainquit qu’elle était allée beaucoup trop loin. Même dans les pires moments, même dans leurs disputes les plus retentissantes, ils finissaient toujours par se retrouver ici, dans ce lit qui avait scellé toutes leurs réconciliations. Elle ne pouvait se souvenir d’une occasion où ils s’étaient couchés fâchés, sans se retrouver avant que le matin ne pointe ses rayons sur leurs draps emmêlés.

Cette fois cependant, Ted ne cherchait ni la réconciliation, ni même la dispute. Il abandonnait. Elle ne pouvait lui accorder cette fuite, persuadée que cela signerait une rupture totale et définitive de ce qui les avait soudés toutes ces années. Andromeda attrapa sa baguette, posée sur la table de chevet à côté d’elle, et la pointa sur la porte de la chambre avant que Ted ne l’atteigne. Il y eut un éclair et un bruit de succion, et la porte se verrouilla. A son tour, Andromeda sortit du lit et rejoignit son mari en allumant la lumière au passage. Les pieds nus sur le parquet glacial, dans cette lumière soudaine qui allait éclairer toutes ses fautes, elle se sentit vaciller. Cette fois, elle y était. Prête à se faire engloutir par l’abîme. « De quoi est-ce que tu parles, Ted ? » Elle croisa les bras sur sa poitrine, se protégeant instinctivement de ce qui allait suivre.

Comment pourrais-tu le savoir, comment pourrais-tu le savoir, une phrase qui tournait dans la tête de Ted, comme un reproche qu’il se faisait à lui même. Il savait que Nymphadora allait bien. Elle était heureuse, un doux mélange d’obstination qui lui venait de ses deux parents, un sourire qu’elle aura volé à Andromeda et les étoiles amusées au creu des iris qu’il partageait avec sa fille. Il était médicomage après tout, si quelque chose n’allait pas bien, il le saurait. — “Elle va bien pour l’instant.” La langue de Ted claque automatiquement contre son palet. À travers la noirceur, à travers la rancoeur, le regard du grand brun lançait des éclairs à son épouse. Je préférais quand tu dormais qu’il grogne, sans pour autant laisser passer un mot de ses lippes. Ce n’était pas vrai. Meda était la personne avec qui il avait voulu affronter la vie et ce, plus ou moins depuis qu’il avait posé les yeux sur elle à Poudlard. — “Ne sois pas dramatique.” Elle va bien. Tout court. et de ça, il en était persuadé. Parce que Meda est une bonne mère, la meilleure selon son avis absolument pas biaisé. Leur fille ne pouvait qu’aller bien dans ses bras, puisque c’était là que lui, se sentait le mieux.

Pas ce soir, toutefois. L’envie de dormir s’était fait éclipsé par le feu qu’ils engendraient tous les deux et pas de la meilleure des façons. Des arguments, ils en avaient eu. Des centaines, mais aucune d’entre elle n’avait découlé d’un mur de silence sur lequel ils ne semblaient pas pouvoir descendre. Alors au lieu de confronter, Ted demande à partir. Prononce des mots qu’il n’avait jamais pensé prononcer et s’était relevé pour mettre à exécution une promesse. Il dormirait dans le salon. Sa sublime épouse toutefois, n’était pas du même avis et si Edward Tonks était têtu.. he had nothing on his wife qui à son tour s’était relevée après lui avoir fait claquer la porte de leur chambre sur le nez. Les épaules de Ted s’affaissent, découragé, et bien conscient qu’il avait ouvert la lampe d’un géni qu’il ne pouvait pas refermer aussi facilement.  — “Génial.”

La lumière l’assomme, il plisse des yeux, éblouis l’espace d’un instant et se retourne vers Andromeda. — “De quoi est-ce que tu parles, Ted ?” Elle s’était avancée jusqu’à lui. La nuque lui chauffait, pour ce qu’il n’avait pas voulu mettre le sujet sur le tapis. Il s’agissait là de toute la raison pour laquelle il tentait d’éviter l’affrontement - parce qu’il n’avait pas le droit. Pas le droit de savoir, pas le droit de l’accuser, pas le droit de lui rappeler le pire moment de leur vie. Il avait cru qu’il allait la perdre ce jour là. Assis dans les estrades, à voir la chute de Meda, incapable de bouger, parce que de toute façon, qu’aurait-il pu faire? Plongeant les mains dans les poches de ses pantalons de survêtement gris, Ted fronce les sourcils. Il hésitait pour ce qu’il ne voulait pas déclencher le reste de cette bataille. — “À toi de me le dire.” Trop tard. Les yeux criants d’une vérité qu’il n’était pas supposé connaître, les bras qui se croisent contre son torse alors que sa seule envie était de les enrouler autour de Meda. Non. Il n’y avait plus de marche arrière possible tout en étant bien incapable de lui cracher les traumatismes secrets à la figure. She’s my everything. — “Je parle du moment où tu as cessé de me faire confiance. Du moment où tu as commencé à garder des secrets, du moment où.. Ton accident.” finit-il, les iris passant du plancher au doux faciès en colère de son épouse.

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@Edward Tonks — décembre 1983

tw: accident
Ne sois pas dramatique. Une requête difficilement tenable, pour une femme menée par ses émotions. Une phrase déjà entendue bien souvent de la bouche de sa génitrice, qui n’appréciait guère les éclats de sa fille. Dramatique, Andromeda l’était depuis l’enfance, et s’était trouvée incapable de tempérer ses ardeurs, déjà à l’époque. La cadette des Black n’était pas de celles qu’on pouvait modeler pour en faire un modèle de tempérance et d’obéissance, et elle en avait payé le prix. Ted avait été l’objet le plus significatif de ses penchants pour le dramatique. Du moment où il était entré dans sa vie, elle avait su qu’elle ne pourrait plus jamais se montrer raisonnable. Aurait-elle été moins passionnée qu’ils ne se trouveraient pas là, cette nuit, à se disputer à mi-voix dans leur chambre maritale, leur fille adorée dormant à quelques mètres de là. Et Ted l’avait épousée en sachant parfaitement qu’elle n’était pas du genre à laisser docilement couler une dispute dans l’oubli.

Mais des deux, il était celui qui se montrait le plus dramatique en tentant sa sortie. Dormir dans le salon. Il était hors de question que Ted dorme ailleurs que dans leur chambre. Son premier réflexe avait été de l’empêcher de sortir pour lui faire face, mais à présent elle n’était plus aussi sûre que cela ait été une bonne idée. Parce que si elle avait besoin d’une bonne vieille dispute pour remettre les choses au clair et repartir sur de meilleures bases, elle ne voulait pas de cette dispute. Il avait parlé de secrets. Elle aurait voulu être capable de se défendre, de répliquer qu’elle n’avait aucun secret pour lui. Elle n’avait jamais souhaité garder quoi que ce soit qu’elle ne puisse partager avec lui, c’était la beauté de leur relation. Elle pouvait tout lui dire, elle lui avait toujours tout dit. Depuis les marches de l’école où elle s’était confiée à lui sur ses doutes à propos de sa famille, jusqu’aux heures si noires où elle avait été reniée par ses sœurs et ses parents et qu’elle avait vacillé sur ses certitudes. Il avait toujours été là pour entrelacer ses doigts aux siens et écouter ses peurs, pour calmer ses colères et accepter ses défauts. Il n’y avait pas eu de secrets entre eux. Jusqu’à ce qu’il y en ait un. Andromeda n’avait même pas voulu le garder pour elle, mais elle l’avait fait. Et Ted le savait.

« À toi de me le dire. » Son regard planté dans le sien, qu’elle eut tant de mal à soutenir. Il y avait tellement de reproche dans ses yeux, elle n’y était pas habituée. La gorge serrée, incapable de prononcer un mot, elle secoua la tête avec hargne, refusant encore d’admettre une vérité qui n’était plus un secret pour personne. Ne m’oblige pas à le dire. La lâcheté n’était pourtant pas de ses défauts, mais cette meurtrissure la terrifiait plus que toute autre. « Je parle du moment où tu as cessé de me faire confiance. Ton accident. » La chute, le choc, le noir, le vide. Elle refoula les souvenirs hachés qui lui revinrent, mais le mal était fait. Instinctivement, ses bras croisés glissèrent sur son ventre et sa main valide s’agrippa au devant de sa chemise de nuit. La douleur se réveilla dans son épaule, remonta le long de sa clavicule, fit courir un frisson glacé sur ses nerfs à vif. « Je n’ai pas – » Sa voix s’enraya, se perdit dans sa gorge. Elle inspira une goulée d’air laborieuse. « Ce n’était pas une question de confiance ! » Lança-t-elle avec un peu plus de force, repoussant la culpabilité pour ce reproche si injuste. Pourquoi parlait-il de confiance ? « Comment – » elle s’arrêta, fronça les sourcils. Le comment passa au second plan quand l’autre question s’imposa. « Depuis quand est-ce que tu le sais ? » Il n’avait rien dit. Il n’aurait rien dit ce soir si elle ne l’avait pas poussé à bout. Depuis quand ? Par Merlin, depuis quand est-ce qu’elle se torturait à l’idée de devoir lui avouer cette faute incommensurable alors qu’il était déjà au courant ? « Tu n’as rien dit ! » Elle réalisait peu à peu, et l’indignation enflait en elle comme un raz-de-marée, l’aveuglant d’une colère si intolérable qu’elle la faisait suffoquer. « Pourquoi tu ne m’as rien dit ? » Son cri lui arracha le cœur et la laissa exsangue. La douleur dans son épaule n’était rien face à celle qui lui serrait la poitrine.

Il n’avait pas fait exprès. Il n’avait pas demandé. On avait assumé qu’il savait déjà. Des fautes qui ne se seraient pas passées s’il n’avait pas été médicomage lui aussi. Ted avait reçu la nouvelle comme un coup de masse sur la tête. Non seulement la vie d’Andromeda avait été en danger, mais une chute effarante leur avait coûté le bonheur de toute une vie, littéralement. Il n’était pas supposé savoir et dans tout ce qu’il fait de manière correcte, Ted a gardé le secret. Il a gardé le secret de sa femme, puis a attendu qu’elle lui offre la confidence de son propre chef. There must have been a reason, il se devait d’en avoir une. Or was he just the asshole who let her suffer all alone?

— “Je n’ai pas – Ted cherchait des réponses, à travers les grand yeux -souvent adorables, et pour l’instant plus proches de l’orage- de sa femme. Ce n’était pas une question de confiance !” Oh? Et s’il ne s’agissait pas de confiance, de quoi s’agissait-il? — “Éclaires-moi, alors.” Parce qu’il n’y avait pas d’autre explication logique à ses yeux. Elle ne lui faisait pas confiance; confiance qu’il ne parte pas sur une quête de vengeance envers sa belle-soeur des enfers, confiance qu’il puisse gérer la nouvelle comme il se devait, confiance qu’il puisse l’aider à porter un fardeau qu’il s’imaginait plus lourd que tout ce qu’elle avait pu porter jusqu’à présent. Andromeda ne lui répondit toutefois pas; toute occupée qu’elle était à voir plus loin que ce qui se trouvait entre eux, à l’instant précis.

— “Comment – et dans un battement de cil, la jeune femme s’était ravisée. Depuis quand est-ce que tu le sais ?” Dans toute l’impatiente dont Ted avait fait preuve, il n’avait même pas réfléchi à l’importance d’un détail comme celui-ci. Les secrets étaient toujours confinés dans leurs poitrines respectives, à peine à la surface et tout semblait voler en éclat. Leurs myocardes, l’obstination dont ils savaient tous les deux faire preuve, tout, tout, tout. — “Un moment.” admit-il, du bout des lèvres, le ton égal à quelques instants plus tôt. Nymphadora dormait non loin, il n’eut toutefois pas l’audace de le mentionner à sa femme qui elle, avait passé l’étape du non retour. — “Tu n’as rien dit !” It wasn’t my place to say something. — “Pourquoi tu ne m’as rien dit ?” I wasn’t supposed to know. et c’est plus fort que lui, Ted à son tour franchit le pas de trop, se rapprochant de Meda, puis haussant le ton dans la foulée. — “Et pourquoi l’aurais-je fait?” L’exaspération suintait de ses cordes vocales, puis la douleur aussi. Celle d’avoir été mis à l’écart, celle d’avoir dû l’apprendre de quelqu’un d’autre, parce qu’on avait assumé qu’il savait.

Refusant d’imploser, d’exploser, Ted se décala d’un pas vers l’arrière. Ses mains, rejoignirent sa chevelure, les doigts croisés sur le derrière de sa tête. Il avait ouvert la boîte de Pandora et il n’y avait aucune façon de la remettre à sa place, intacte. Aucune. Maybe he was in the wrong, but maybe they are both at fault here. — “Tu as eu de nombreuses occasions de m’en parler.” se défendit-il, enfin. Ted devait le reconnaître, pas pendant les derniers mois et ça, c’était de sa faute à lui. Il s’était montré patient, dans un silence qu’il pensait réconfortant pour Meda et dans une présence qu’il avait voulue infaillible.. jusqu’à ce qu’elle ne le soit plus. Il avait voulu bien faire et elle le lui rejetait à la figure comme s’il avait trahit sa confiance. Comme ce qu’elle lui avait fait, à lui. — “Je voulais te laisser le temps et maintenant c’est de ma faute?”

meet me in the afterglow
@Edward Tonks — décembre 1983

tw: fausse-couche
« Éclaires-moi, alors. » Andromeda comprit, l’espace d’un instant, à quel point elle avait pu blesser Ted en lui cachant la perte de leur enfant. Elle n’avait jamais eu l’intention de le mettre de côté ainsi, et elle n’avait jamais songé qu’il en conclurait qu’elle lui avait ôté sa confiance. Oui, elle perçut dans sa question l’ampleur de sa douleur et elle en fut bouleversée – mais sa compassion fut soufflée en un instant quand elle réalisa qu’il lui avait menti, lui aussi. Il savait et il n’avait rien dit, il l’avait laissée seule, enfermée dans sa souffrance sans rien faire pour la soulager. Et depuis un moment. Un moment, ce n’était rien et c’était tout, c’était dix minutes comme ce pouvait être des années. Un moment c’était déjà trop. Elle voulait le secouer pour en savoir plus, pour connaître le moment précis, et le qui, et le comment, et le où. Mais tétanisée par la stupeur, elle ne put que lui crier son incompréhension. Le pourquoi qui prévalait tout le reste. Pourquoi l’avoir laissée seule, pourquoi ne pas avoir partagé ce qu’il savait …

« Et pourquoi l’aurais-je fait? » Sa réplique lui fit l’effet d’une gifle. Pourquoi l’aurait-il fait ? C’était tellement absurde ! « Pour m’éviter de devoir le faire ? Tu le savais ! Pourquoi est-ce que tu as fait traîner les choses comme ça ? » Répliqua-t-elle avec brusquerie, tout en sachant parfaitement que ce genre d’argument valait également pour elle. Mais si elle se savait coupable, elle ne pouvait s’empêcher de lui en vouloir de s’être tu. Elle avait souffert, et il n’avait rien dit. Elle avait plongé dans la dépression, et il n’avait rien dit. Elle s’en était voulu de ne pas savoir comment le lui annoncer, et il savait. Mais il n’avait rien dit. « Tu as eu de nombreuses occasions de m’en parler. » Il s’était reculé et elle résista à l’envie de s’avancer pour réduire à nouveau la distance. « Ah oui ? Et quand ça ? Quand tu rentres si tard de l’hôpital et que tu préfères dormir plutôt que de parler avec moi ? » Elle se savait injuste, elle s’en voulait de ces arguments pathétiques, mais au fond c’était la vérité. Si elle avait menti, lui s’était défilé. Il passait le plus clair de son temps à l’hôpital et elle avait eu le sentiment qu’il l’évitait. Plus il s’était plongé dans son travail, plus ils s’étaient éloignés et moins elle avait trouvé le courage de lui parler. « Je voulais te laisser le temps et maintenant c’est de ma faute? » A nouveau la culpabilité, à nouveau les remords.

« Alors c’est de la mienne ? » Sa mauvaise foi était à son paroxysme, mais au fond elle savait très bien ce qu’il en était. « Très bien ! J’ai – » elle s’arrêta brusquement, regarda le mur qui séparait leur chambre de celle de Dora et pointa sa baguette dessus. Avant de laisser sa colère se déchaîner, elle devait veiller à ce que les mots qu’elle allait prononcer ne puissent atteindre leur fille. Le sortilège d’assourdissement lancé, elle jeta sa baguette au sol et regarda à nouveau Ted. « J’ai perdu notre bébé ! Voilà, c’est dit ! » Sa voix se cassa, les mots étaient si rudes à prononcer même dans ce tourbillon d’émotions intenses. Pourtant elle poursuivit sur sa lancée, incapable de s’arrêter. « C’est ma faute, je sais ! » Cria-t-elle, éperdue. « Mais est-ce que tu peux imaginer un seul instant ce que ça fait, de – » Elle secoua la tête, réduite au silence l’espace d’une seconde, écrasée par le souvenir de la souffrance qui l’avait anéantie. « Je voulais te le dire ! » Elle n’arrivait même plus à crier. « Depuis tout ce temps il ne s’est pas passé une minute sans que j’y pense et que je me dise que je devais le faire ! » Son cœur battait si fort qu’il résonnait dans tout son corps, ses mains tremblaient, sa voix trébuchait, mais les mots continuaient de s’échapper. Ils étaient restés enfermés trop longtemps. « J’étais seule, Ted ! J’étais seule à le savoir parce que je voulais vous faire la surprise après le match, mais je n’ai pas pu le faire et je n’avais plus rien, j’étais juste seule et en colère, et je n’arrivais même pas à te le dire ! » Pouvait-il seulement le comprendre ? « Mais toi ! » Elle pointa un index accusateur sur lui. « Tu le savais, et tu ne m’as rien dit ! » Elle ne porterait pas toute la culpabilité, elle s’y refusait. « Je n’avais pas besoin de temps, j’avais besoin de toi ! »

— "Pour m’éviter de devoir le faire ? Tu le savais ! Pourquoi est-ce que tu as fait traîner les choses comme ça ?" Si Andromeda n'avait pas  tout à fait tort, Ted se mura dans un silence de plomb, convaincu d'avoir fait l'action honorable. L'accident ne lui était pas arrivé à lui, il ne pouvait pas décemment comprendre la douleur que sa femme avait traversé encore moins la communiquer de manière décente. Il n'avait pas voulu en parler, convaincu que ses actions parleraient pour lui. Que sa présence la rassurerait, qu'il pourrait recoller les morceaux, sans forcer Andromeda à revivre son trauma. He was visibly wrong, mais de là à l'admettre.. Le sorcier se défendait comme il le pouvait, très mal, et rendait les coups de sa femme dans une joute verbale qui ne ferait aucun vainqueur. — "Ah oui ? Et quand ça ? Quand tu rentres si tard de l’hôpital et que tu préfères dormir plutôt que de parler avec moi ?" Indigné, Ted jaugea sa femme de la tête aux pieds; he could see the hurt and yet ne pouvait que lui offrir sa propre souffrance en retour, lui offrir les pires parties de lui pour ce qu'il n'arrivait pas à offrir le meilleur. — "Tu dis ça, comme si je passais ma journée à m'amuser au lieu de sauver des vies!" C'était bas. Très bas. Pour ce que Meda avait toujours été supportive de sa carrière, de ses débuts rocailleux à maintenant. Tout comme il avait pu le faire au quotidien.. avant l'accident.

S'il y avait des blâmes à placer, il les refusait catégoriquement, tout comme cette femme qu'il chérissait, il ne faisait que survivre; à ce que Bellatrix Lestrange avait su leur enlever. — "Alors c’est de la mienne ?" En rejetant la faute, Ted n'avait jamais voulu la rejeter sur sa femme. Loin de là. Les iris sombres s'écarquillèrent, alors qu'il avançait à nouveau d'un pas. Elle déformait ses mots, il ne pourrait jamais penser une telle infamie. — "Ce n'est pas ce que je voul- "Très bien ! J’ai – Ted déglutit, pour ce qu'il savait, mais n'avait entendu ces mots, qu'une seule fois auparavant, de la bouche d'un autre médicomage. Non. It was way worse coming from Meda. J’ai perdu notre bébé ! Voilà, c’est dit !"

Le palpitant de Ted se contracta dans une douleur latente. S'il la pensait passagère, elle revenait en vague depuis près d'une année maintenant. Toujours aussi puissante, peut-être même plus, à soutenir le regard de la jeune femme. L'impression qu'on lui écrasait la gorge, d'un étau dont il ne pouvait pas se défaire. Meda l'avait frappé d'une vérité qui le mettrait assurément k.o, s'était assurée, en mère lionne, que Nymphadora n'entende rien de tout cela. Si la stature de l'homme se voulait impassible, l'intérieur s'effondrait au moins aussi vite que ses défenses. Ted n'aimait pas parler. Il détestait défendre ses idées, préférant réparer. Il ne savait plus par où commencer. — "C’est ma faute, je sais !" Le choc nécessaire pour qu'il puisse retrouver la voix, ou du moins pour qu'il puisse grogner. — "Non, pas du tout." Il ne savait même pas si elle l'avait entendu. — "Mais est-ce que tu peux imaginer un seul instant ce que ça fait, de –  De ses mains s'étaient formés des poings qu'il tenta de défaire, en même temps que les muscles de son dos. Tell me. Je voulais te le dire !" mais tu ne l'as pas fait. — "Depuis tout ce temps il ne s’est pas passé une minute sans que j’y pense et que je me dise que je devais le faire !" Absorbé par ses propres douleurs, ses propres lacunes, il ne pu s'empêcher de craquer à son tour. — "Mais tu ne l'as pas fait!" Ce que Ted pensait en boucle, encore et encore, au grand jour, alors qu'il haussa le ton, heurté.

— "J’étais seule, Ted ! J’étais seule à le savoir parce que je voulais vous faire la surprise après le match, mais je n’ai pas pu le faire et je n’avais plus rien, j’étais juste seule et en colère, et je n’arrivais même pas à te le dire !" Ted accusa le coup sans broncher, il ferma les yeux, un instant sous l'impact, mais les rouvrit aussitôt afin de ne pas tomber. Il pouvait voir ce futur alternatif, il pouvait presque le toucher. Sentir le parfum d'un nouveau-né, le sourire de son épouse sous un baiser qu'il a initié. Il pouvait tout voir, il pouvait distinguer Dora, autoritaire en tant que grande soeur, et surtout, il les voyaient heureux. Un futur volé qu'il ne pouvait pas avoir. Qu'ils ne pouvaient pas avoir. Désarçonné, Ted manqua les lames qui se retournaient contre lui. Il manquait les accusations, tout en y connaissant l'origine. Quelque chose bourdonnait en ses oreilles, camouflait tout le reste. J'avais besoin de toi!" Dans son agitement, Ted s'était de nouveau reculé, afin de faire les cents pas, mais s'immobilisa aux paroles de sa femme.

— "Vraiment?" Il se retourna en sa direction, plus triste qu'en colère. Il ne s'était pas éclipsé du jour au lendemain. n'avait pas appris pour cette grossesse avortée pour ne plus jamais lui parler non. Il s'était effacé, comme le temps, blessé d'un poids trop lourd à porter seul, dans un entêtement qui lui venait de sa déformation professionnelle. He wasn't supposed to know. How dumb is that excuse? — "Parce que j'étais juste là, Meda." Plus doux, ce sont ses deux paumes qui retrouvent les bras de la jeune femme. Sa peau est froide, sous son contact et il s'en voulait terriblement. Elle ne s'était pas sentie assez en confiance pour lui parler. Il ne l'avait pas fait par soucis de ne pas la blesser plus qu'ils ne l'était déjà. Si Andromeda pensait toutefois qu'il avait voulu l'abandonner dans la pire étape de sa vie, il ne pouvait plus rester dans l'inaction. — "J'ai été là à tous les jours. à l'hôpital, les jours d'après. À la maison, à border leur fille inquiète. Essuyé les larmes de Dora. Alors qu'elle se demandait enfin, quand maman allait revenir à la maison. Tenté de garder cette famille en sûreté. Ses yeux flirtaient désormais avec le sol, pour ce qu'il avait faillit à la tâche, ces derniers mois, gardé par une frustration qui semblait s'être déversée d'un coup. De te protéger." de moi, de cette façon que j'ai de t'abîmer sans le vouloir. Et puis surtout, la solitude écrasante qu'il avait pu ressentir à ses côtés, sans jamais vouloir s'en départir pour autant. — "J'avais besoin de toi, moi aussi." Enfin, ses iris croisèrent celles de sa femme.

— "T'as quitté notre mariage avant que je n'en disparaisse, mon amour."

You checked out mentally and I erased myself.
What's left of us my love, if not a burning pain.